Labour : Jeremy Corbyn renforce ses positions au sein de la direction du parti
Les résultats sont sans surprise. Les candidats soutenus par Momentum, le mouvement qui rassemble les proches du leader travailliste, Jeremy Corbyn, ont remporté les trois sièges créés pour représenter les constituency labour parties (les organisations de base du parti travailliste) au sein de l’organe de direction du Labour, le National Executive Committee (NEC). Les résultats ont été rendus public lundi 15 janvier à l’heure du déjeuner. Ils font suite à un mini remaniement du shadow cabinet, qui voit le retour de Clive Lewis, le remuant membre du parlement pour Norwich-South, sur le frontbench.
Le jeune élu, connu pour ses positions europhiles autant que pour son positionnement à la gauche du parti, avait été démis de ses fonctions au sein du shadow cabinet après avoir refusé de voter pour l’activation de l’article 50, qui lançait, officiellement, le Brexit. Il revient donc au sein du « gouvernement en attente », avec une fonction moins importante, celle de ministre du Trésor, sous l’autorité de John McDonnell. Il remplace à ce poste Rebecca Long-Bailey, qui prend le rôle de shadow secrétaire d’Etat pour les affaires, l’innovation et la stratégie industrielle.
Parmi les autres figures de ce remaniement, on note l’arrivée de Laura Pidcock, qui devient shadow ministre au travail, un poste nouveau. Proche de la gauche travailliste, elle a été élue membre du parlement pour North West Durham lors de l’élection anticipée de 2017, succédant à Pat Glass. Dan Carden, nouvel élu pour Liverpool Walton, intègre le département du développement international où il es rejoint par Preet Gill, qui a emporté le siège de Birmingham Edgbaston lors du dernier renouvellement. Le remaniement, limité à treize nominations dans des postes de ministres (des responsabilités secondaires) fait ainsi la part belle aux parlementaires élus en juin dernier.
Mais il fait aussi un geste envers ceux qui ont gagné un siège au profit du Labour. Ainsi, Matt Rodda, qui a défait le tory sortant à Reading East, intègre le shadow cabinet avec la responsabilité des transports locaux. Tombeuse des conservateurs à Crewe and Nantwich, Laura Smith rejoint le shadow cabinet office. Karen Lee, qui a battu les tories à Lincoln, est elle aussi promue comme shadow ministre en charge des services d’incendie.
Elle remplace Chris Williamson, qui a quitté le poste. Considéré comme un allié de la première heure de Corbyn, Williamson a quitté le frontbench le 11 janvier dernier. Il a démissionné après avoir demandé un doublement des taxes prélevées par les councils sur les habitations les plus onéreuses. Au-delà de la controverse suscitée par sa proposition, celui qui s’est mis en lumière lors du drame de Grenfell a voulu reprendre une liberté de parole que sa position au sein du shadow cabinet lui ôtait.
Cette démission, qui procède selon des sources internes d’un accord avec le leader travailliste, illustre la prudence dont fait preuve, actuellement, Corbyn. Malgré les bons résultats de ses proches lors du scrutin pour désigner les trois nouveaux membres du NEC, il tâche de ménager ses opposants. Loin de constituer une démonstration de magnanimité, ce geste du membre du parlement pour Isligton-North répond au souci de conserver les équilibres délicats au sein du parti travailliste et de ne pas froisser le parliamentary labour party (le groupe parlementaire) au sein duquel il est toujours minoritaire.
En revanche, les élections générées par la création de trois postes supplémentaires au sein de la direction du Labour témoignent que le centre de gravité politique travailliste a basculé à gauche. Même le controversé Jon Lansman, chair de Momentum, le groupe des fidèles de Corbyn, a été élu. Il intègre le NEC aux côtés de la conseillère de Manchester Yasmine Dar et de Rachel Garnham. Cette dernière devance de plus de 23,400 voix Eddie Izzard, le premier des non élus qui était pourtant le moins mal placé dans la course. Avec l’élection de Richard Leonard à la tête du Scottish Labour, Corbyn a, de fait, laminé ses opposants. Il ne leur reste plus que le Pays-de-Galles, où Carwyn Jones n’est plus en position de peser sur le parti travailliste britannique.
Le leader travailliste va pouvoir amplifier les réformes internes qu’il promeut depuis plusieurs mois. Elles visent à donner plus de pouvoir aux adhérents, notamment dans l’élaboration des positions du parti. Un domaine dans lequel, jusqu’à présent, le Parliamentary Labour Party disposait d’une sorte de prééminence malgré le contrepoids des syndicats.
Pour autant, ces derniers mouvements ne signifient pas, véritablement, que le Labour a maqué un virage à gauche. Comme en témoigne le départ de Chris Williamson, sanctionné pour avoir outrepassé ses fonctions, même si sa proposition d’augmenter les impôts des plus riches pourrait convenir à Corbyn. Le leader travailliste a déplacé le curseur. C’est désormais lui qui incarne le centre du Labour ou, du moins, c’est ce qu’il souhaite.
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Elections au NEC – 3e groupe (Constituency Labour Parties) 3 postes à pourvoir
Candidats | Voix | Résultats |
DAR, Yasmine | 68,388 | Elue |
LANSMAN, Jon | 65,163 | Elu |
GARNHAM, Rachel | 62,982 | Elue |
IZZARD, Eddie | 39,508 | |
BAXTER, Johanna | 27,234 | |
JOSAN, Gurinder Singh | 25,224 | |
DONOVAN, Nick | 11,944 | |
MORRISON, Nicola | 7,551 | |
TAYLOR, Sarah | 7,011 |