Les Libéraux-démocrates se rêvent en champions du maintien du Royaume-Uni dans l’Union européenne
A entendre Tim Farron, c’est « sa » manif. Samedi 2 juillet, dans les rues de Londres, plus de 50,000 personnes ont clamé leur amour de l’Europe et leur désespérance après le Brexit. Le leader du parti Libéral-Démocrate (Lib-Dems) n’en demandait pas tant. Ne se sentant pas contraint par les résultats du référendum sur le maintien du Royaume-Uni au sein de l’Union européenne, malgré 52% et 1.3 millions de voix de majorité au camp du Brexit, le leader très libéral – mais fort peu démocrate sur ce coup – entend incarner le camp européen. Et, par là, rebooster son parti, en mal de notoriété autant que de crédibilité.
En effet, les élections générales du mois de mai 2015, ont vu le groupe parlementaire Lib-Dem fondre comme neige au soleil, passant de 57 à 8 élus. Depuis lors, le nouveau leader du parti, Tim Farron, poursuit avec acharnement l’objectif de rendre son parti de nouveau visible. Malgré ses efforts, cela ne s’était pas produit lors de la conférence du parti en septembre 2015. Difficile d’incarner l’opposition aux Conservateurs quand on a été leur allié fidèle pendant 5 ans.
Sur le plan électoral, le parti se comporte mieux en 2016 lors des élections partielles qui se déroulent tout au long de l’année. Il affiche un score moyen de 15.9%. Pour autant, lors des élections locales du mois de mai 2016 les résultats ont été plus mitigés. Certes, les Lib-Dems enregistrent un gain de 45 sièges au plan national (pour un total de 378), premier progrès notable depuis 2010. Mais, il ne dirige que 4 Conseils locaux sur 124 (58 pour le Labour et 38 pour les Conservateurs). Le parti reste marginal en Ecosse (5 élus) et au Pays-de-Galles (où il est passé de 5 à 1 élu). A Londres, il ne conserve qu’un élu et plafonne à 4.6 % des suffrages, derrière les Greens.
Mais cette fois, selon Tim Farron, le contexte a changé. L’issue du vote lors du référendum change la donne pour le parti profondément favorable à l’appartenance du Royaume-Uni à l’Union Européenne. Depuis le scrutin, il fait tout ce qu’il peut pour apparaître. Selon Tim Farron, les Lib-Dems connaîtraient un véritable sursaut, « une adhésion par minute », faisant passer le parti à 70.000 membres. Les Green annoncent de leur côté 60.000 membres, tandis que les conservateurs sont aux alentours de 150.000. Le Labour domine toujours avec plus de 450.000 adhérents (dont 60.000 dans les derniers jours en prévision des élections internes).
Peu importe que le cortège des Lib-Dems soit peu fourni lors de la « March for Europe », la manifestation de 50.000 personnes qui s’est déroulée samedi 2 juillet à Londres en faveur du maintien de l’Union Européenne. Tim Farron le revendique, les Lib-Dems sont le parti des 48 %. Le seul parti en faveur du camp du maintien, histoire de souligner que les tories et Labour sont plus que divisés sur la question. Et les Lib-Dems sont en campagne pour exiger une nouvelle consultation puisque, pour eux, le résultat du 23 juin est réversible et – surtout – pas contraignant. Ce sera le cheval de bataille du parti aux prochaines élections générales. Si elles ont lieu.
Cette posture s’inscrit aussi dans le cadre de la crise profonde que connaît le parti travailliste. Le parti libéral-démocrate, héritier de l’ancien parti whig (libéral), est né d’une fusion avec l’éphémère parti social-démocrate. Ce dernier est issu d’une scission du Labour quand une ligne de gauche jugée « dure » par l’aile droite travailliste l’avait emportée. Tim Farron nourrit secrètement l’espoir de rééditer l’opération en récupérant les plus europhiles des membres travaillistes du parlement si Corbyn venait à être conforté dans son rôle de leader du Labour.
Silvère Chabot