Sécurité : la candidate May contredite par la ministre May
Au surlendemain de l’attentat le plus meurtrier qui a frappé le Royaume-Uni depuis l’attaque du 7 juillet 2005 à Londres, la campagne officielle en vue des élections générales n’a toujours pas repris. La grande question, pour les observateurs étrangers, demeure : « Est-ce que les attentats vont avoir un impact sur le scrutin ? ».
A l’évidence, Theresa May tente de profiter de l’occasion pour se muer en chef de guerre face au terrorisme, comme son lointain prédécesseur, Margaret Thatcher, l’avait fait avec la guerre des Falklands contre l’Argentine en 1983.
C’est aussi dans ce contexte qu’il faut comprendre pourquoi la première ministre a relevé le niveau d’alerte à « critique », le degré le plus élevé, qui caractérise un attentat non seulement comme « hautement probable » mais surtout comme « imminent ».
Ce choix de revêtir les habits de chef d’un pays en guerre renvoie aux heures les plus sombres et les plus héroïques de l’histoire de la Grande-Bretagne. Chacun pense à Winston Churchill en 1940. Mais tout le monde oublie que, la guerre n’étant pas encore finie notamment face au Japon, le même Churchill a été sèchement battu lors des élections de juillet 1945.
Plus récemment, l’assassinat de la membre du parlement travailliste Jo Cox a endeuillé la campagne du référendum pour ou contre la sortie de l’Union européenne. La vague d’émotion consécutive au meurtre de la parlementaire europhile n’a pas empêché le Brexit de gagner.
La tradition britannique consiste à répondre à l’agression extérieure – un attentat rentre dans cette catégorie – avec flegme. La défiance la plus extrême consiste à ne rien changer à ses habitudes. C’est le fameux « business as usual » qui était au coeur de l’intervention du Mayor for Greater Manchester, Andy Burnham, mardi 23 mai.
Pas sûr, donc, que l’attaque qui a endeuillé la cité du Nord bouscule l’élection générale. Il se pourrait même que le jeu auquel se livre Theresa May se retourne contre elle. Il faut relever que les principaux partis d’opposition, Labour et Lib-Dems, observent une réserve prudente. Leurs prises de position publiques ont été marquées par le souci d’unité et de dignité.
Pour l’heure, aucune polémique sur la gestion des attentats n’est venue ternir une campagne pourtant marquée par quelques polémiques peu ragoutantes.
Les observateurs se rappelleront cependant que la ministre de l’Intérieur de David Cameron, une certaine Theresa May, a présidé aux coupes budgétaires qui ont eu pour conséquences la suppression de 20,000 postes de policiers sur le territoire.
En novembre 2015, le shadow Home secretary, le travailliste Andy Burnham, alertait sur le risque que ces coupes faisaient courir à la sécurité du pays. Prenant exemple sur la cité du Nord, le désormais Mayor pour la métropole mancunienne affirmait alors :
« Greater Manchester police pourrait se trouver dans l’incapacité de faire face à une attaque terroriste en raison des restrictions budgétaires ».