Labour party : la lutte contre l’antisémitisme en passe de devenir une cause commune
POUR FETER LA PAQUE JUIVE, LE LABOUR RENFORCE SON CREDO CONTRE L’ANTISEMITISME. Pour mettre fin à ce qu’elle considère comme une « diversion« , Christine Shawcroft, une proche de Jeremy Corbyn, a démissionné du National Executive Committee (NEC – l’organe de direction et de régulation du Labour). Elle avait été accusée de « laisser faire » l’antisémitisme en tant que cheffe de la commission de discipline du parti. John McDonnell, le bras droit du leader travailliste, est également sorti de son silence. Enfin, Momentum a annoncé la mise en place de formations pour lutter contre les attitudes et les propos anti-juifs au sein du Labour.
Le groupe Momentum, qui rassemble la jeune garde rouge corbynite, a estimé que « les préjugés antisémites sont bien plus répandus au sein du parti travailliste que nous le pensions il y a encore quelques mois« . Lors de sa tentative de candidater au poste de secrétaire général du Labour, le patron de Momentum, Jon Lansman, avait été la cible d’attaques en raison de sa confession juive. La direction de l’organisation, dans un communiqué, ajoute :
« Les accusations d’antisémitisme ne peuvent pas et ne devraient pas être écartées comme relevant simplement de ragots droitiers ou de complots. »
La propension antijuive au sein du parti travailliste, si elle ne concerne qu’une minorité des militants, a des origines complexes. Parmi elles, on trouve la défense, classique dans un parti qui a majoritairement adopté le libéralisme philosophique et politique, de la liberté d’expression. L’évolution du conflit israélo-palestinien constitue aussi un facteur, inconscient pour certains, de l’évolution de l’antisémitisme chez certains activistes travaillistes. La critique de la politique du gouvernement israélien s’efface au profit d’une attaque systématique contre l’état d’Israël. Enfin, la critique légitime du sionisme, idéologie politique visant à l’établissement d’un état pour les Juifs, prend, bien souvent, la forme de l’antisémitisme.
Pour d’autres, enfin, la question de l’antisémitisme est un aspect secondaire dans un agenda politique surdéterminé par la lutte des classes. C’est le cas, notamment, pour Jeremy Corbyn dont personne, pas même Tony Blair, ne remet en cause l’engagement contre toutes les formes de racisme, incluant les discriminations envers les Juifs. Le leader travailliste a fait son mea culpa, dans un courrier adressé aux organisations communautaires israélites la semaine passée.
C’est dans ce contexte que 2,000 supporters de Jeremy Corbyn ont pu signer une lettre ouverte dans laquelle ils qualifient la manifestation organisée par la communauté juive lundi 26 mars dernier comme le résultat du travail « d’un groupe d’intérêts particuliers très puissant ». Cette formulation a fait sortir John McDonnell, le shadow chancelier de l’Echiquier et patron de la gauche travailliste, de ses gonds. Dans un tweet, il a sèchement taclé les signataires :
« Accuser les juifs de constituer un ‘groupe d’intérêts particuliers très puissant’ relève d’un stéréotype antisémite qui sape plus qu’il ne soutient Jeremy Corbyn dans sa volonté d’unir nos communautés. »
Durant ce week-end, Christine Shawcroft, membre de la direction de Momentum, a démissionné du NEC, « avec effet immédiat« . Une décision qui suit celle de se retirer de la direction de la commission de discipline du parti travailliste. Elle avait été mise en cause pour avoir refusé, dans un premier temps, d’exclure un élu local du Labour qui avait partagé, sur facebook, une publication niant l’existence des chambres à gaz. Elle avait plaidé la négligence, reconnaissant avoir questionné la décision de suspension « avant d’avoir tous les éléments et d’avoir, particulièrement, vu la publication en question ». Elle a depuis présenté ses excuses. Son retrait des instances a pour but de mettre fin à la controverse.
Pourtant, elle ne cesse pas encore. Cette fois, c’est Jeremy Corbyn qui est dans le viseur. Comme tous les ans, le leader travailliste a participé, en dehors de son mandat politique, au repas rituel d’entrée dans les festivités de la pâque juive, Pessa’h. Selon les témoins, il a participé « activement » aux rituels. Ce qui est reproché au membre du parlement pour Islington-North, c’est d’avoir partagé ce moment avec Jewdas, un groupe juif progressiste, se décrivant comme « une voix radicale pour la diaspora alternative« . Cette organisation se montre souvent critique des politiques déployées par le gouvernement israélien.
Depuis 2015, la commission des conflits du Labour party a eu à traiter 300 signalements d’antisémitisme. Le parti recense pratiquement 600,000 adhérents.