Angleterre : réduction de services et croissance des inégalités pour l’enfance
L’ENFANCE VICTIME DE L’AUSTERITE. Ce jeudi 5 avril, la fondation Stutton Trust a publié un rapport qui signale la fermeture de 1,000 Sure Start Children’s Centres depuis 2010 et, plus globalement, la baisse des crédits affectés à l’action en faveur de l’enfance. Selon une étude réalisée par le Labour party, les dépenses en faveur de l’enfance et de la jeunesse ont diminué d’un milliard de livres depuis 2012. Le secteur est pris en ciseau entre la baisse des crédits gouvernementaux d’un côté et les conséquences des réductions des dotations aux autorités locales de l’autre.
Les Sure Start Children’s Centres ont été créés, pour la seule Angleterre, en 1998 à l’initiative du chancelier de l’Echiquier travailliste de l’époque, Gordon Brown. Ce sont des centres qui combinent accueillent des enfants et aide aux parents, à mi chemin entre la crèche et le planning familial en France. Ils prennent en chargent la tranche d’âge comprise entre 0 et 5 ans. Ce programme gouvernemental a été transféré, en 2005, aux autorités locales. Il existe des répliques au Pays-de-Galles et en Ecosse, disposant d’un financement différent.
Alors que les données officielles font état de 500 centres fermés en Angleterre depuis 2010, Stutton Trust affirme que ces chiffres sont largement sous-estimés. La fondation évalue à 1,000 le nombre de Children’s Centres qui ont disparu sur le même laps de temps. Selon son étude, la baisse des crédits constitue le premier facteur de motivation dans la fermeture des dispositifs, raison évoquée dans 84% des cas par les collectivités qui ont du procéder à de telles décisions.
Selon une autre étude, publiée en 2017, les dépenses en faveur des services à l’enfance ont diminué de 9% dans les councils anglais depuis 2010. Pendant la même période, le nombre d’enfants considérés en besoin a augmenté de 5%. Par ailleurs, des milliers d’entre eux sont suivis par des assistants sociaux quand ils ne sont pas placés dans des dispositifs de protection de l’enfance.
La fondation estime que les réductions budgétaires ont pour conséquence un accès très inégal aux services destinées à la petite enfance à travers le pays. Elle ajoute que, dans les Children’s Centres qui existent toujours, seule une partie des prestations initialement prévues sont encore proposées, ce qui a des conséquences néfastes sur la mobilité sociale. Stutton Trust affirme enfin que des milliers d’enfants n’ont pas accès à des services considérés comme « vitaux ».
Créateur de la fondation, Sir Peter Lampl a souligné, en présentant son rapport : « La qualité des services à la petite enfance fait une différence substantielle dans le développement des enfants, particulièrement ceux qui viennent des foyers les plus pauvres. C’est un sujet grave que l’offre des Sure Start Children’s Centres soit aujourd’hui plus faible (en termes de nombre et de services) qu’il il y a une décennie. »
Cette étude conforte celle réalisée par le Labour Party, sous l’autorité d’Angela Rayner, shadow secretary à l’Education et en charge de la petite enfance. Les chiffres collectés par le parti travailliste font état d’une explosion des frais de garde de la petite enfance. En Angleterre, pour un enfant de deux ans, ils s’élèvent à 121 livres par semaine, contre 82 en 2009 (dernière année de gouvernement Labour). La hausse est de 47%, quand le salaire n’a augmenté que de 17% dans la même période.
Le gouvernement conservateur a maintenu une aide permettant 30 heures gratuites de garde pour les foyers dont les deux parents travaillent. Elles s’appliquent aux enfants âgés de 3 à 4 ans. Les enfants de 2 ans ne sont concernés que si leur famille bénéficie de certaines allocations destinées aux bas revenus.
Plus grave, selon l’Institute for Fiscal Studies, le principal organisme d’évaluation des politiques publiques, jusqu’à 160,000 enfants sont menacés de ne plus avoir accès au seul repas chaud qui leur est, pour l’heure, garanti dans la journée. Depuis le 1er avril, les enfants issus de foyers bénéficiaires de l’allocation universelle, Universal Credit, dont les revenus sont inférieurs à 7,400 livres par an peuvent prétendre à un repas gratuit à l’école. Malgré l’inflation, ce plafond n’a pas été révisé à la hausse, laissant sur le carreau des dizaines de milliers d’enfants.
Selon Equality and Human Rights Commission, l’organisme britannique en faveur de l’égalité, d’ici à 2021, ce sont 1.5 millions d’enfants supplémentaires qui pourraient vivre dans la pauvreté. Selon les chiffres des organisations non gouvernementales, à l’heure actuelle, un enfant sur trois vit dans la pauvreté en Grande-Bretagne.