Brexit : la Chambre des Communes appelée en renfort ?
ALORS QUE LE CADENAS SEMBLE FERME A DOUBLE TOUR, THERESA MAY APPELLE LES PARLEMENTAIRES A LA RESCOUSSE. Dimanche 10 février, un membre du gouvernement britannique a annoncé que la chambre des Communes pourra amender une nouvelle motion sur la sortie de l’Union européenne si la Grande-Bretagne ne parvient pas à obtenir un accord avec l’Union européenne. James Brokenshire, secrétaire d’Etat aux Communautés (l’équivalent de ministre français des collectivités locales), a confirmé la démarche en amont d’un nouveau débat au parlement, prévu jeudi prochain et annoncé houleux. Mais les parlementaires n’ont pas attendu l’autorisation du gouvernement pour s’organiser, notamment ceux qui refusent toujours une sortie sans accord.
A l’heure où ces lignes sont écrites, la perspective d’un no-deal Brexit semble toujours l’option la plus plausible. Dans la semaine, la première ministre a rencontré les leaders européens qui lui ont signifié que les négociations demeurent ouvertes… pour l’après sortie. En tout état de cause, malgré l’appel au compromis lancé par la chancelière allemande Angela Merkel, la fermeté est toujours de mise sur le « filet de sécurité » destiné à prévenir tout retour à une frontière physique entre les deux parties de l’Irlande. Or, c’est ce sujet qui prive Theresa May de toute majorité à la Chambre des Communes.
Le gouvernement envisage donc de rééditer l’opération qui lui a, en apparence, réussi fin janvier. En cas d’absence de progrès dans les échanges avec l’Union européenne, il proposera un texte qui sera amendable par les membres du parlement. L’échéance est fixée à la fin de ce mois de février.
Pour sortir de l’impasse, le leader du parti travailliste, Jeremy Corbyn a proposé un compromis : soutien au projet de sortie porté par le gouvernement conservateur, s’il intégrait le maintien dans l’union douanière avec l’Europe des 27. Corbyn a aussi suggéré, dans un courrier publié jeudi 7 février (jour où Theresa May se trouvait à Bruxelles), un « alignement dynamique sur les droits et protections » européens, l’engagement de participer aux agences et programmes de financement européens (notamment dans les domaines de l’environnement, de l’éducation et de la réglementation industrielle) et la coopération en matière de sécurité, notamment la garantie de pouvoir accéder au mandat d’arrêt européen et aux bases de données européennes.
L’initiative du leader du Labour a reçu un accueil favorable de la part des dirigeants et négociateurs de l’Union européenne qui ont pressé Theresa May d’approuver ce compromis. La cheffe du gouvernement a refusé tout net. Mais le compromis mis sur la table par Jeremy Corbyn a provoqué une nouvelle poussée de fièvre parmi ses propres parlementaires. La partie la plus engagée en faveur du maintien au sein de l’Union européenne a brandi la menace d’une scission. C’est la cinquième fois depuis que Corbyn a pris les rênes du parti qu’une telle possibilité est évoquée… Les rebelles arguent de ce que la proposition écarterait la possibilité d’un second référendum. Successivement, John McDonnell, le bras droit du leader travailliste ; Keir Starmer, shadow secretary pour le Brexit, et Tom Watson, le leader adjoint, ont pourtant affirmé que l’option est toujours sur la table.
Plus sérieusement, deux MPs travaillistes ont élaboré une proposition alternative. Peter Kyle et Phil Wilson ont préparé un amendement qui prévoit le soutien au traité de sortie présenté par le gouvernement en échange de l’organisation d’un second référendum. La consultation soumettrait au vote des Britanniques une alternative claire : soutien au texte négocié par Theresa May ou maintien dans l’Union européenne. La proposition a reçu le soutien actif de figures europhiles du parti conservateur dont Sarah Wollaston, Dominic Grieve et Anna Soubry.
Une enquête d’opinion publiée par le quotidien the Independent, dimanche, montre que 53% des Britanniques soutiennent un report du Brexit. Seuls 33% des interrogés se déclarent favorables à une sortie sans accord, même si cela doit affaiblir l’économie du pays.